Élisabette Zelaya est une étudiante regorgeant d’idées. Elle explore de nombreux médiums et maîtrise aussi bien la vidéo, que l’installation ou encore la performance. Jeune artiste touche-à-tout, l’étudiante fabrique elle-même la plupart des éléments qu’elle utilise dans son travail. Elle ne recherche pas la perfection technique ou esthétique. De ce fait, aux matériaux nobles, elle préfère les objets quotidiens, comme un tourne-disque ou une cafetière, qu’elle transforme toujours. La notion de déplacement traverse l’ensemble de son travail. Elle exécute de nombreuses performances et définit son corps comme une « machine à produire ». Pour les réaliser, la jeune femme utilise des objets qu’elle s’autorise à modifier selon ses besoins. De ce fait, elle les considère comme des accessoires et non comme des reliques. Dans le passé, les objets ont été pensés de différentes façons selon les performeurs. Certains ont été employés comme de simples ustensiles. En 1974, Marina Abramovic réalise sa célèbre performance Rhythme 0. L’artiste installe à côté d’elle une table sur laquelle sont disposés 72 objets et donne l’autorisation au public de les utiliser sur sa personne. On conserve de cette performance des photos mais non les objets qui ne revêtent pas un intérêt particulier en eux-mêmes. Au contraire, Rebecca Horn fabrique elle-même ses accessoires de performance et ces derniers sont, par la suite, conservés dans des musées comme c’est la cas pour les Finger Gloves. Les accessoires qu’Élisabette Zelaya juge comme étant les plus à même de répondre à ses intentions sont les chaussures. Étant de petits objets facilement transportables, elles lui permettent aisément d’improviser des performances. De ses recherches est née une série de « chaussures impossibles ». Ces dernières connaissent des modifications qui les rendent inutilisables pour leur fonction première, mais qui en font des objets sculpturaux. Parmi ces chaussures impossibles, nous pouvons citer celles formées par des plaques de métal utilisées à la manière de taloches durant la performance intitulée Obra de obra de obra. La jeune artiste puise ses idées dans son passé. Ainsi, dans plusieurs installations sont intégrés des éléments appartenant au domaine de la danse, comme des pointes et un tutu. Si son intérêt pour la danse est le fruit d’un rêve de petite fille jamais exaucé, celui pour la religion vient au contraire d’une pratique qui lui a été imposée dans son enfance. Élevée au sein d’une famille très croyante, elle a étudié la Bible en profondeur. Cette éducation pieuse a fait naître en elle une relation ambivalente envers la religion, entre amour et haine. Dans un certain nombre de ses œuvres, elle utilise des éléments issus de la culture catholique, puis les transforme de façon à mettre en avant sa vision de la religion. Lors de sa performance El camino de cruz, Élisabette Zelaya a chargé sur son dos une sculpture en savon représentant la Vierge Marie et effectué un pèlerinage au cours duquel elle a distribué des morceaux de cette sculpture, qui deviennent ainsi des «reliques de propreté». L’étudiante évoque ainsi le culte des reliques qui avait cours durant le Moyen-âge. La participation du spectateur est également l’une des préoccupations d’Élisabette Zelaya. Elle joue avec nos cinq sens et plus particulièrement avec notre odorat. Elle a, par exemple, tenté de réaliser le parfum de sa rue en ramassant ce qui s’y trouvait, mégots de cigarette, excréments, souris morte... La jeune artiste a fait macérer l’ensemble pendant un moi afin d’obtenir son parfum, puis a diffusé cette odeur dans une pièce noire. La notion d’art total peut être évoquée pour résumer le travail d’Élisabette Zelaya. Il s’agit d’une volonté de réunion des disciplines, des techniques, de l’œuvre et du spectateur, un désir de synthèse des arts. Toutes ces caractéristiques sont bien présentes dans la démarche d’Élisabette Zelaya.


Nicolas Sayous

Elisabette Zelaya